Les Graciées
Culture,  Lecture

Les Graciées de Kiran Milwood Hargrave

Vous n’avez pas encore eu votre lot de chasse aux sorcières ? Alors Les Graciées de Kiran Milwood Hargrave pourraient vous plaire !

Résumé

24 décembre 1617 : la petite communauté de VardØ, située au nord du cercle polaire, est frappée par une étrange et foudroyante tempête qui décime l’entièreté des hommes du village, tous partis pêcher.

Une fois remises du choc de la perte, les femmes du village s’organisent pour leur survie. Entre elles, deux clans se forment : les dévotes, emmenées par Toril, et les autres, dont font partie Maren (20 ans) et Kristen (qui pourrait être sa mère).

Trois ans plus tard, débarque Absalom Cornet, un homme de Dieu écossais dont la mission est de débarrasser la régions des sorcières et autres Samis (nom donné aux Lapons). Il est accompagné d’Ursa, sa toute jeune épouse, peu habituée à vivre dans un tel dénuement.

Ce que j’en ai pensé ?!

Comment ne pas vibrer au fil des aventures que vivent ces femmes ?! J’ai eu du mal à me représenter la difficulté d’une vie pauvre dans une contrée si froide où la nuit dure si longtemps en hiver. Il m’a fallu quelques pages avant de m’immerger dans ce roman tant ce monde est à l’opposé de ce qui m’attire. Mais une fois que j’avais rencontré Maren et Kirsten, je ne pouvais plus les quitter !

Neuf jour après la tempête, alors que commence la nouvelle année, les hommes leur sont rendus. Déposés comme des offrandes dans la petite crique noire ou soulevés par les vagues jusqu’aux rochers qui précèdent la maison de Maren.

p.30

L’écriture de l’autrice est vive, tranchante : elle colle parfaitement au caractère de ces femmes, à leur vie austère. Mais elle peut également être emprunte de douceur et de poésie quand elle aborde les relations qui se nouent entre Maren et Kirsten, puis entre Ursa et Maren. L’autrice parvient merveilleusement bien à nous faire ressentir les émotions de ses protagonistes, qu’elles soient positives ou négatives. Plusieurs fois, j’ai ressenti des frissons en lisant ses lignes…

Ursa se demande souvent ce qu’elle raconterait à Agnete, si elle était là. Elle n’a pas de mots pour décrire la confusion qui règne en elle : cette impression de n’être plus chez elle dans son propre corps; cette habitude nouvelle de se servir du silence comme d’une arme.

p. 114

Le roman nous parle des dérives d’un excès de bigoterie : il nous montre toutes les horreurs que l’on peut commettre au nom de la religion, que ce soit par l’intermédiaire de Toril ou d’Absalom Cornet. Les événements qui nous sont dépeints sont révoltants. On peine à croire que ces personnes puissent réellement penser toutes les inepties qu’elles débitent.

L’autrice nous décrit également avec beaucoup de justesse et de finesse la manière dont les relations se nouent ou se dénouent entre les personnages : la froideur d’Absalom envers Ursa qui fond parfois quand il se laisse gagner par le désir ; les tensions qui montent dans la maison de Maren, entre les trois femmes qui y vivent et ne partagent plus les mêmes croyances ; l’amitié particulière qui lie Maren et Ursa, au grand dam de leur entourage respectif, …

Les hommes de ce roman sont tous [ou presque] particulièrement exécrables : ils représentent ce que la soif de pouvoir peut offrir de pire, dans tous les domaines. On pourrait presque qualifier ce roman de misandre tant il nous donne envie de tous les détester.

C’est un très bon roman, inspiré de faits réels, qui nous fait prendre conscience des dangers qu’encourent les femmes quand elles choisissent de ne pas rester sagement à la place qui leur a été assignée.

Une très belle lecture qui m’aura pas mal remuée et que je vous recommande chaleureusement !

Infos pratiques

  • Titre : Les Graciées
  • Autrice : Kiran Millwood Hargrave
  • Traductrice : Sarah Tardy
  • Édition : Robert Laffont, collection Pavillons, 2020
  • Nombre de pages : 394 pages
  • Genre : historique

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