Lecture,  Société

Deux livres sur l’exil

Aujourd’hui, je change un peu de format pour vous parler de deux témoignages lus durant le mois de septembre et ayant des thèmes similaires, dont celui de l’exil.

Le Grand Quoi de Dave Eggers

Il s’agit ici de la la biographie romancée de Valentino Achar Deng écrite par Dave Eggers sur base de ses longues discussions avec le jeune soudanais.

L’ouvrage est écrit à la première personne et nous raconte l’histoire de Valentino, depuis son enfance paisible dans son village du Sud Soudan jusqu’à son intégration aux USA, en passant par ses longues années d’exil.

Ce livre m’a été prêté par une collègue qui trouve important de diffuser son contenu et je la rejoins tout à fait ! Pourtant, je dois admettre que je n’ai pas spécialement aimé cette lecture.

Tout d’abord, j’ai éprouvé des difficultés vis-à-vis de la narration : on alterne des passages témoignant de la vie plus ou moins présente de Valentino avec des chapitres qui concernent son passé au Soudan. Le principe narratif est assez particulier puisque le narrateur raconte son intégration au narrateur puis, chaque fois qu’il rencontre une personne dans son « présent », il s’adresse directement à cette personne pour lui raconter ses souvenirs d’enfance et d’adolescence. Dès lors, il y a de nombreuses longueurs, quelques répétitions et les évènements du présent n’apportent pas grand-chose au récit si ce n’est pour expliquer que ces réfugiés ne sont pas nécessairement plus heureux une fois en Amérique car la violence et les discriminations sont toujours présentes.

Par le biais de Valentino, Dave Eggers témoigne des atrocités vécues par ceux qu’on appelle Les Enfants perdus du Soudan. On découvre les longues marches effectuées par ces gosses, à travers tout le pays pour échapper aux exactions des Murahaleens, des mercenaires anciennement bergers, à la solde du gouvernement islamique de Khartoum. Ce récit est extrêmement dur et violent : on assiste aux massacres de villages entiers, à la vente d’esclaves, aux attaques d’animaux sauvages ou encore à la violence de l’enrôlement des enfants soldats.

C’est également l’occasion pour nous de découvrir en quoi consiste la vie dans les camps de réfugiés : l’inconfort, la malnutrition, l’éclosion des maladies dues au manque d’hygiène, mais aussi l’organisation des réfugiés et des ONG pour tenter d’offrir à ces enfants un minimum d’éducation.

C’est pour toutes ces raisons que je trouve que la lecture de ce texte est importante : cela nous permet de mieux comprendre pourquoi ces jeunes [garçons, pour la plupart ; les filles ayant été vendues comme esclaves] ont choisi de quitter leur pays pour tenter de vivre et de s’éduquer dans nos pays avec, souvent, l’espoir de pouvoir retrouver les terres de leurs ancêtres et reconstruire leur pays.

C’est absolument bouleversant et révoltant.

Infos pratiques

  • Titre : Le grand Quoi
  • Auteur : Dave Eggers
  • Traducteur : Samuel Todd
  • Édition : Folio, 2010
  • Nombre de pages : 689 pages
  • Genre : témoignage, non-fiction
  • Challenges :

Moi, Malala de Malala Yousafzaï

Ce second témoignage vous est sans doute plus familier : il s’agit de l’autobiographie de Malala Yousafzaï, jeune pakistanaise originaire de la province du SWAT qui s’est fait abattre par les Talibans car elle militait pour le droit à l’éducation des filles. Aujourd’hui [ou du moins, au moment d’écrire son livre], elle vit en Angleterre où elle a été soignée car elle risque toujours de se faire tuer par les Talibans si elle retourne dans son pays.

Ce qui pourrait étonner à la lecture de cette autobiographie, c’est que l’histoire de Malala en elle-même n’est présentée qu’assez tard dans le livre. La jeune fille évoque, tout d’abord, la vie de sa famille et , plus particulièrement, celles de son père et de son grand-père paternel, sous l’angle de leur éducation.

Ensuite, elle retrace l’histoire du Pakistan pour permettre aux lecteur⋅ices d’Occident de comprendre comment le régime taliban a pu s’implanter dans la région et y imposer sa loi.

Ce n’est qu’ensuite qu’elle s’attarde sur sa propre éducation et son combat pour continuer à aller à l’école.

Ici encore, je ne peux pas dire que j’ai aimé ma lecture. J’ai trouvé que le ton employé par Malala, surtout quand elle aborde les thèmes qui la concernent directement, était assez enfantin et, parfois, un poil vantard dans le sens où elle se présente comme une enfant admirée par la plupart de ses interlocuteurs. Elle paraît faire preuve d’une grande éloquence et d’une grande maturité alors que, lors de certains événements racontés, elle n’avait pas dix ans. Puis, dans le même temps, elle nous relate ses disputes et ses jeux amicaux avec ses camarades de classe où elle apparaît comme une gamine assez puérile et immature, même une fois devenue adolescente.  Cela paraissait peu cohérent et je me demande à quel point son regard sur elle-même est biaisé. Mais je pense ici que c’est davantage un problème éditorial : il y aurait dû y avoir une meilleure relecture de ces passages, à mon sens pour leur redonner plus de cohérence.

A côté de cet aspect narratif quelque peu dérangeant, je trouve le fond de ce récit très important et j’admire sa ténacité et son courage. Le message qu’elle porte est d’une importance capitale : pour elle, l’ignorance est la cause du malheur des populations qui se trouvent alors incapables de penser par elles-mêmes et de comprendre qu’elles se font berner par les hommes au pouvoir qui veulent leur imposer un mode de vie.

Pour cette raison, j’ai trouvé important de lire ce témoignage et d’encourager un maximum de personnes à le lire : pour que son combat et son exil ne soient pas vains.

Infos pratiques

  • Titre : Moi, Malala. Je lutte pour l’éducation et je résiste aux Talibans
  • Autrice : Malala Yousafzaï
  • Traducteur : Pascal Loubet
  • Édition : Le Livre de Poche, 2014
  • Nombre de pages : 424 pages
  • Genre : témoignage, non-fiction
  • Challenges :
    • Catégorie “Lire une femme marquante” du FéminiBooks Challenge
    • Catégories “Nouveau Départ” et “Eté indien” du BacktoBooks Challenge
    • Sous Catégorie “Attention aux souliers pointus” du Pumpkin Autumn Challenge

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