Couverture de Mémoires d'une jeune fille rangée de S. de Beauvoir
Lecture

Mémoires d’une jeune fille rangée de Simone de Beauvoir

Depuis ma (re)lecture du Deuxième sexe, j’avais très envie de lire Mémoires d’une jeune fille rangée de Simone de Beauvoir. L’occasion m’en a été donnée par Fanny et Moka puisque le thème de septembre pour le challenge “Les classiques, c’est fantastique“, c’était justement l’autobiographie.

Résumé

Dans ce premier volet, Simone de Beauvoir nous narre son enfance dans une famille parisienne bourgeoise, catholique et désargentée, jusqu’à son entrée dans l’âge adulte et sa rencontre avec Sartre.

Ce que j’en ai pensé ?!

Je ne vais pas vous mentir, au début de ma lecture, j’ai quelque peu déchanté ! Tout d’abord, j’ai été un peu dérangée par le côté guindé que l’on retrouvait dans l’écriture de Simone de Beauvoir [surtout lorsqu’elle nous relate ses pensées d’enfant]. S’ajoutait à cela le fait que j’avais du mal à m’intéresser aux questionnements existentiels de cette gamine légèrement imbue de sa personne. En réalité, je crois que je peinais surtout à souscrire à l’idée qu’une enfant de cet âge [max 6 ans] puisse avoir des réflexions aussi poussées sur son mode de vie ou sur ce qu’elle envisage de l’avenir. Et même si on part du principe qu’il s’agit d’une analyse à posteriori réalisé par la Simone adulte, je reste sceptique.

Jusqu’alors, j’avais grandi en marge des adultes ; désormais, j’aurais mon cartable, mes livres, mes cahiers, mes tâches ; ma semaine et mes journées se découperaient selon mes propres horaires ; j’entrevoyais un avenir qui, au lieu de me séparer de moi-même, se déposerait dans ma mémoire : d’année en année, je m’enrichirais, tout en demeurant fidèlement cette écolière dont je célébrais en cet instant la naissance.

Par contre, même en ce qui concerne cette période enfantine, j’ai beaucoup aimé l’analyse que l’autrice fait de son milieu : le portrait qu’elle brosse de ses parents ou de l’éducation à laquelle ils la soumettent, etc. Autant vous dire qu’elle partait de loin et qu’il a dû lui falloir beaucoup de force pour s’extirper de ce carcan et apprendre à penser autrement !

A regarder le monde à travers les versets de l’Évangile et les colonnes du Matin, la vision se brouille. Je n’avais d’autre ressource que de me réfugier, tête baissée, dans l’autorité.

Puis vint l’adolescence : son amitié avec Zaza, son amour pour son cousin Jacques, sa soif de savoir et son besoin d’émancipation, … Là, c’était bon, j’étais happée voire complètement passionnée ! Dans ses mémoires, Simone de Beauvoir se présente sans fards avec ses tâtonnements, ses doutes, ses colères parfois puériles, etc. On y découvre une jeune fille qui peine à trouver sa place dans ce milieu bourgeois, dont elle ne partage pas les valeurs, mais aussi à l’extérieur de celui-ci, car la main mise de sa famille sur son éducation la rend gauche et assez inapte en société. Elle se réfugie alors dans le travail avec un objectif bien précis : celui de devenir enseignante afin d’être indépendante et de pouvoir consacrer une partie de son temps à l’écriture de son œuvre littéraire.

Je ne voyais pas de commune mesure entre ces deux destins. Avoir des enfants, qui à leur tour auraient des enfants, c’était rabâcher à l’infini la même ennuyeuse ritournelle ; le savant, l’artiste, l’écrivain, le penseur créaient un autre monde, lumineux et joyeux, où tout avait sa raison d’être. C’était là que je voulais passer mes jours ; j’étais bien décidée à m’y tailler une place.

La figure du père est importante dans ce tome : on y rencontre un homme que j’ai trouvé fort égoïste et superficiel, qui a une vision assez étriquée de ce que doit être une femme [Les marges de mon exemplaires contiennent quelques insultes à son égard]. Il ne supporte pas que sa condition financière ne lui permette pas d’offrir cette place à ses filles qui devront chercher à travailler plutôt qu’à faire un bon mariage. On comprend le choc que cela a dû être pour Simone de voir ce père adulé s’éloigner d’elle au fur et à mesure qu’elle grandissait et ne répondait plus à ses attentes.

Somme toute, j’ai trouvé que l’amitié avec Zaza, qu’on présente souvent comme le cœur de ce premier volet, était assez peu développée, même si elle reste bien présente [elle se cantonne surtout à la deuxième partie – sur 4 – des mémoires]. Cela tient sans doute à cette distance, cette pudeur, que l’une et l’autre maintenaient dans leur relation ainsi qu’à l’hostilité toujours plus grande de la famille de Zaza envers Simone et son mode de vie. J’ai eu l’impression que Jacques prenait plus de place que Zaza [en termes d’occurrences, pas nécessairement en termes d’impact sur son existence].

J’ai parfois trouvé le temps long sur certains passages, assez cycliques, où Simone tombe dans le désespoir et ressasse beaucoup les mêmes réflexions [elle aurait souffert de dépression saisonnière que cela ne m’étonnerait pas]. Mais, finalement, c’est une lecture qui m’a fait forte impression et m’a donné envie de tout lire de cette autrice tant j’ai aimé certaines fulgurances de sa plume [quand elle décrit ses moments dans la nature, autour de sa maison de campagne] et les réflexions qu’elle amène, que ce soit au sujet de la littérature, de l’écriture ou de questions plus féministes. Je ne tarderai donc pas à me procurer le tome suivant !

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