Rhapsodie des oubliés de Sofia Aouine
Lecture

Rhapsodie des oubliés de Sofia Aouine

Voilà longtemps que je n’avais plus dévoré un roman en une après-midi comme ce fut le cas pour Rhapsodie des oubliés de Sofia Aouine.

Résumé

Abad a 13 ans. Ayant dû quitter le Liban quand il avait 7 ans, il vit depuis lors à Paris, et plus précisément à Barbès, avec ses parents. Il nous raconte son quotidien dans le quartier entre les montées de sève propres à l’adolescence, ses visites imposées chez la dame “d’ouvrir dedans”, les baisers volés avec la fille d’en face dans les cages d’escalier et ses rencontres avec Gervaise, la prostituée qui rêve de retrouver sa fille et Odette, sa vieille voisine qui lui fait découvrir les livres.

Ce que j’en ai pensé ?

De prime abord, j’ai été happée par ce roman et surtout, par l’écriture de Sofia Aouine mêlant le langage cru de l’adolescence révoltée à une mélancolie presque poétique. C’est percutant et souvent poignant.

En amoureuse de la littérature, j’ai aimé ses clins d’œil à Zola ou Romain Gary. A Bashung, aussi.

Le personnage d’Abad est intéressant : un adolescent sensible, plus intelligent qu’il ne s’en donne l’air, quelque peu obnubilé par le sexe [messieurs, rassurez-moi sur le fait que l’autrice a largement exagéré cet aspect des choses !] et qui ne sait comment faire sortir la colère qui semble le dévorer. Peinant à trouver sa place, il participe aux bêtises adolescentes basées sur l’ignorance et la quête d’une certaine mise en valeur, tout en suivant ses impulsions qui l’incitent à aller vers les opprimé·es.

Mais, en refermant le roman, j’ai soudain été fâchée. J’avais cette impression de m’être laissée entrainer dans une histoire magnifiquement bien écrite mais qui multiplie les clichés. Tout ce que Paris compte de plus sordide semble évoluer dans l’entourage d’Abad : les apprentis djihadistes et leurs petites sœurs transformées en Batman [sic], les mères de famille dévalisant quotidiennement les rayonnages de chez Tati pour oublier l’étroitesse de leur vie, les prostituées venant de tout le continent africain et exploitées par des proxénètes sans scrupules… jusqu’à la psy juive installée sur les hauteurs de Montmartre et dont les parents se sont faits déporter en 42. Et si, sur le moment, j’ai su apprécier cette lecture et les personnages qu’elle nous présente, je n’ai pas pu m’empêcher, finalement de trouver que c’était trop. De me dire que ce n’était pas crédible que ce gamin de 13 ans, en l’espace de quelques mois, soit confronté à toutes ces horreurs [et encore, je ne vous ai pas tout dit]. Je crois que c’est le dernier chapitre qui a fait déborder le vase et a ôté toute crédibilité à cette histoire. Du moins, à mes yeux. Cela m’attriste d’autant plus que, prises indépendamment les unes des autres, ces histoires sont criantes de justesse dans la manière dont elles sont décrites par l’autrice. La détresse ressentie par ces oublié·es ne peut que vous prendre aux tripes.

Je suis donc déçue car je pense que j’aurais réellement pu adorer ce roman avec quelques drames en moins. Ou alors, si ces différentes histoires avaient été écrites sous la forme de nouvelles, prenant place dans le quartier mais sans, nécessairement, que les personnages soient en contact direct avec Abad. Je ne sais pas.

Néanmoins, je suivrai ce que proposera encore Sofia Aouine car j’ai beaucoup aimé sa plume.

Infos pratiques

  • Autrice : Sofia Aouine
  • Titre : Rhapsodie des oubliés
  • Année de parution : 2019
  • Édition : Éditions de la Martinière, 2019
  • Nombre de pages : 202 pages
  • Genre : contemporain

Si vous avez lu Rhapsodie des oubliés de Sofia Aouine, venez m’en parler. 🙂

Cela m’aidera peut-être à démêler les sentiments confus qui m’habitent à son égard, depuis une semaine !

5 commentaires

Si vous souhaitez me laisser un petit mot...