Le Maitre des illusions
Lecture

Le Maître des illusions de Donna Tartt

Les choses terribles et sanglantes sont parfois les plus belles

Cela vous donne le ton du Maître des illusions de Donna Tartt… De cette autrice, j’avais lu Le Chardonneret, il y a tout pile trois ans, qui m’avait fait une assez forte impression.

Résumé

Richard, étudiant boursier originaire de Californie, vient d’intégrer l’Université de Hampden, dans le Nord des USA. Très vite, il éprouve une certaine fascination envers un groupe d’étudiants des langues classiques, assez élitiste, et souhaite faire partie de leur classe. 

Au fil des mois, l’ambiance se dégrade entre ces jeunes qui semblent partager de lourds secrets. Jusqu’où Richard est-il prêt à aller pour être membre de cette élite ?

Ce que j’en ai pensé ?!

J’avais déjà tenté la lecture de ce roman il y a quelques années et l’avais abandonné car on m’avait vendu un thriller et je m’y ennuyais… En lisant Le Chardonneret, j’ai compris que cela ne pouvait pas être un thriller rebondissant car la romancière se plaît à nous ancrer dans l’univers de ses personnages avec une certaine lenteur. Je décrirais ses ouvrages davantage comme des “romans d’ambiance”, très introspectifs, dans lesquels il peut se passer des événements qui impliquent de petites touches de suspens.

Ici, nous nous immergeons dans la vie d’une petite université américaine, spécialisée dans les Sciences humaines et l’art, qui semble vivre repliée sur elle-même. On y suit Richard dans ses cours de littérature, son job d’étudiant et ses fêtes arrosées. L’ensemble du récit est raconté à la première personne du singulier.

Comme dans Le Chardonneret, le personnage principal se trouve en marge du groupe qu’il intègre. Richard, en tant que boursier, n’a pas d’énormes moyens financiers, contrairement à ses amis, tous issus de familles plus ou moins aisées. Cependant, il n’assume pas sa condition et s’invente un passé plus glorieux. Il y a beaucoup de réflexions intéressantes dans ce roman, au sujet de l’argent et du maintien des apparences. Le jeune homme se place en observateur de ses camarades et nous décrit leurs comportements et leur personnalité avec beaucoup de minutie.

“Je dors mieux ici que d’habitude ailleurs”, a dit Henry en remontant ses lunettes et en se penchant à nouveau sur son dictionnaire. Il y avait dans l’angle de ses épaules une légère indication de fatigue et d’effort que moi-même, vétéran de nombreuses nuits sans sommeil, j’ai immédiatement reconnue. Je me suis brusquement rendu compte que ce labeur ingrat n’était probablement rien d’autre qu’un moyen de tromper les petites heures du matin, de même que certains insomniaques font des mots croisés.

L’autre thème majeur du roman, comme dans Le Chardonneret, c’est la consommation plus qu’excessive d’alcool, de drogues et de médicaments à laquelle s’adonnent les différents protagonistes. Tout au long de ma lecture, j’étais fascinée par la facilité avec laquelle ces jeunes s’en procurent et par les dérives qui découlent de cette surconsommation. L’autrice aime visiblement faire vivre des épisodes psychotiques à ses junkies de personnages…

Il est aussi beaucoup question de jalousie, que ce soit sur le plan sentimental ou sur celui de la réussite.

La figure du mentor est également très importante, aussi bien à travers le personnage de Julian, le professeur quasi exclusif du groupe, qu’à travers le personnage d’Henry qui est leur meneur. Que se passe-t-il lorsque l’on s’aperçoit des failles de son mentor ? Comment celui-ci réagit-il lorsqu’il comprend qu’il perd la confiance de ses ouailles ? C’était instructif…

Par contre, j’ai trouvé que ce roman tirait à nouveau en longueur et j’aurais bien aimé l’élaguer, par moments. Il nous arrive de tourner en rond, comme les personnages. La grande importance accordée aux “leçons” de grec et de latin peut aussi rebuter celles et ceux qui ne sont pas sensibles à ces matières.

L’autre gros bémol de cette lecture, c’est la qualité de sa traduction. J’ai tiqué sur certaines tournures de phrases, à plusieurs reprises ainsi que sur le choix de certaines traductions. Je me suis demandé si par hasard, Pierre Alien n’était pas Québécois, ce qui pourrait expliquer pourquoi il appelle le Happy Meal du Mc Do le “Menu Bonheur”. Mais sa fiche sur le site de la BNF dit qu’il était Français [donc je suppose qu’il ne fréquentait simplement pas ce lieu d’hérésie gastronomique, ce qui n’est pas une tare en soi. Mais il aurait quand même pu se renseigner un minimum…]. Je me suis aussi demandé durant toute ma lecture à qui les “Isramiens”, avec lesquels Julian travaille, faisaient référence. Si quelqu’un⋅e a lu la version anglophone, je veux bien qu’il⋅elle m’éclaire sur cette question. C’est le deuxième roman que je lis, au cours des dernières semaines, dont les choix de traduction me dérangent pendant ma lecture. Pourtant, d’habitude, ce n’est pas spécialement une chose à laquelle je suis sensible. Ça vous arrive souvent, vous ?

Donc, globalement, Le Maître des illusions fut une bonne lecture même si ce roman n’arrive pas à égaler, à mes yeux, la qualité du Chardonneret. En même temps, plus de vingt ans séparent la parution de ces deux romans donc il est normal que l’écriture de l’autrice se soit améliorée.

Infos pratiques

  • Titre : Le Maître des illusions
  • Autrice : Donna Tartt
  • Traducteur : Pierre Alien
  • Édition : Pocket, janvier 2014 (premier dépôt légal en 1994)
  • Nombre de pages : 706 pages
  • Genre : contemporain, drame

Vous avez déjà lu les romans de cette autrice ?

 

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