Culture,  Lecture

The Girls d’Emma Cline

Alors que vient de sortir le dernier Tarantino, qui revisite le mythe de la Manson Family, j’ai eu envie de me plonger dans un roman qui aborde le même thème, sous un angle différent, abandonnant le gourou pour s’intéresser à ses ouailles : The Girls d’Emma Cline.

Résumé

Été 1969. Evie Boyd a 14 ans et s’ennuie ferme alors que ses parents viennent tout juste de se séparer. Comme ces derniers ne savent plus comment gérer son éducation suite à ce divorce, ils ont décidé de l’inscrire en pension, à la rentrée. Alors qu’elle ère dans les parcs de sa ville, elle fait la rencontre de Suzanne, une fille d’une petite vingtaine d’années qui la fascine et dont elle veut absolument être aimée. Suzanne vit dans une étrange communauté, en dehors de la ville, dirigée par un certain Russell : chanteur au succès très relatif mais surtout gourou qui aime s’entourer de très jeunes filles…

Ce que j’en ai pensé ?!

Dans ce roman, nous alternons les passages très actuels où une Evie adulte occupe la maison de vacances d’un ami après avoir perdu son emploi et les passages où elle se remémore les événements de 1969, lorsqu’elle fréquentait le ranch où squattaient Russell et ses filles. Les transitions entre les deux époques ne sont pas toujours évidentes, ce qui m’a parfois un peu perdue.

Ce roman raconte surtout le mal-être que peut ressentir une adolescente relativement livrée à elle-même à l’âge ingrat où ses hormones se réveillent et son corps change. Evie est une jeune fille très peu sûre d’elle, qui n’a pas l’air de savoir comment évoluer dans le monde. Elle est désespérément à la recherche d’un modèle à suivre, qui l’aimerait et l’aiderait à prendre sa place dans l’univers des adultes. Faute d’une figure maternelle convaincante, elle trouve ce modèle auprès de Suzanne, la compagne privilégiée de Russell.

Dans The Girls, il est aussi beaucoup question d’emprise. La plus évidente est celle du gourou envers les jeunes femmes qu’il utilise comme bonnes à tout faire et esclaves sexuelles. Mais il y a également celle que Suzanne maintient sur Evie, qui est plus insidieuse et tout aussi perverse. Pourtant, au début de leur rencontre, Suzanne semble avoir voulu protéger Evie de l’influence du ranch.

Plus tard, je me rendrais compte que Suzanne était la seule qui ne soit pas folle de joie d’être tombée sur moi par hasard, là au bord de la route. Il y avait quelque chose de formel et de distant dans son attitude. Je ne peux la qualifier que de protectrice. Suzanne voyait la faiblesse qui était en moi, éclairée et évidente : elle savait ce qui arrivait aux filles faibles.

Ce qui m’a choquée dans ce roman, c’est la place importante qu’y tiennent l’alcool et les drogues. Dans le ranch, cela semble assez évident et incontournable. Par contre, bien avant d’y avoir mis les pieds, Evie avait déjà eu plusieurs fois l’occasion d’en consommer : elle buvait régulièrement de l’alcool et fumait de l’herbe sans que cela n’ait l’air de heurter qui que ce soit. Je ne sais pas si c’était la norme dans la société huppée de Californie dans les années 60 mais cela m’a étonnée.

M’étais-je déjà sentie aussi seule, avec une journée entière devant moi, et tout le monde qui s’en fichait ? […] Il s’agissait de s’occuper me dis-je, une combustion des heures sans friction. Je me préparai un martini comme me l’avait appris mon père, je renversai du vermouth sur ma main et ignorai l’éclaboussure sur le dessus du bar.

Dans ce roman, j’ai également trouvé beaucoup de théories sur la position des femmes dans leurs rapports aux hommes. On y trouve un sentiment de peur et de résignation, notamment dans les réflexions d’Evie adulte. Elle semble totalement avoir intégré une position de victime et de soumission.

Ce n’est donc pas un roman très positif : il s’en dégage un sentiment de malaise quasi constant. Je ne dirais pas que ce fut une lecture agréable et plaisante : j’étais plutôt contente de l’avoir terminée. J’ai d’ailleurs du mal à comprendre son si grand succès : c’est un bon roman mais il ne me laissera pas un souvenir impérissable et je ne pense pas avoir envie de le relire un jour.

Vous l’avez lu ?! Qu’en avez-vous pensé ?

Infos pratiques

  • Titre : The Girls
  • Autrice : Emma Cline
  • Traducteur : Jean Esch
  • Édition : 10/18, 2017
  • Nombre de pages : 360 pages
  • Genre : contemporain
  • Challenges : “Lire une autrice d’un autre pays” pour le FeminiBooksChallenge et “Livre avec un titre en deux mots” pour le challenge 2019 de Mille vies en une.

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